Le Collier Rouge est un roman écrit par Jean-Christophe Rufin, inspiré de faits réels.

Pourquoi je m’y intéresse ? Tout simplement parce que c’est un témoignage de la place que peuvent occuper les chiens auprès de l’humain.

Voilà maintenant 100 000 ans (!) que les chiens marchent au côté des humains. Pourtant, cela fait peu de temps qu’on commence à considérer qu’ils sont plus que des « machines biologiques », pour reprendre Descartes qui estimaient que les bêtes n’avaient que des réflexes et étaient dénuées de conscience.

C’est donc assez intéressant de regarder quelle place ont occupé les animaux à nos côtés au cours des âges, et notamment nos premiers compagnons : les chiens.

Quoi de mieux donc, que de lire quelques histoires parlant de chiens ?

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Attention, ça va spoiler un max ! Si vous souhaitez garder le suspense entier, je vous conseille de lire le livre d’abord. Vous êtes avertis…

 

L’histoire donc. 1919. Un homme, ancien soldat, attend dans une prison d’un petit village, d’être jugé pour un crime dont nous n’avons pas encore connaissance.

Dehors attend son chien, qui aboie nuit et jour.

L’intrigue commence véritablement quand arrive l’officier qui doit instruire l’affaire. Il cherche à comprendre pourquoi Morlac, le prisonnier, a commis cet acte incompréhensible.

Morlac a été décoré pourtant, c’est un héros de guerre malgré lui. Je ne vais pas vous raconter tous les détails, ni vous faire une critique littéraire. Ce qui m’intéresse, c’est l’histoire en elle-même, et la place qu’y occupe le chien.

Chien dont on se sait pas grand chose, mis à part qu’il s’appelle Guillaume et qu’il aboie constamment sur la place où est retenu son maître. Il est très amoché et pitoyable. En outre, lorsque le juge essaie d’en apprendre plus, il semble que Morlac le déteste…

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Guillaume, qui n’appartenait à personne, a suivi Morlac à la guerre et a partagé avec son régiment le quotidien des batailles. Il faisait figure de mascotte, mais n’avait pas de maître. Il aimait juste suivre Morlac.

Morlac était soldat, mais, influencé par ses lectures chez son amie, il ne croyait plus dans cette guerre. Il voyait que c’était toujours les mêmes qui servaient de chair à canon et il finit donc par fomenter une fraternisation avec les soldats ennemis.

Fraternisation qui a failli avoir lieu : au moment de la rencontre fatidique, après des mois de préparation minutieuse pour convenir d’un plan commun avec les troupes en face afin de se débarrasser des officiers, Guillaume ne voit que des troupes ennemies se diriger vers son régiment, et attaque un soldat, semant la pagaille et déclenchant des hostilités.

 

Est-ce ce crime pour lequel est puni Morlac ? Non, car ses supérieurs n’auront jamais cette version de l’histoire. Voilà comment cette nuit de fraternisation ratée par la faute d’un chien fut interprétée : l’ennemi a tenté une attaque surprise et Morlac, à la tête d’un petit groupe d’hommes, l’a repoussé.

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La guerre est finie et Morlac se retrouve donc décoré de la Légion d’honneur.

C’est le 14 juillet 1919 que Morlac va commettre l’impensable. Alors que le défilé se prépare, il s’approche de la tribune des officiels, décline son identité et proclame un discours mémorable, clef de toute l’affaire :

« Pour sa conduite exemplaire sur le front d’Orient, n’hésitant pas à attaquer un soldat bulgare animé pourtant d’intentions pacifiques, le soldat Guillaume présent devant vous a mérité la plus haute reconnaissance de la Patrie. »

« Soldat Guillaume, au nom du Président de la République, je vous accueille dans l’ordre de l’ignominie qui récompense la violence aveugle, la soumission aux puissants et les instincts les plus bestiaux, et je vous fais chevalier de la Légion d’honneur. »

 

Décodage Sauvage

Dans le livre, Morlac se revendique clairement contre la guerre, et en veut à Guillaume de s’être comporté comme le soldat modèle que toutes les armées veulent posséder. A savoir : un être d’une obéissance sans faille, d’une loyauté telle qu’elle est dépourvue de toute empathie, de toute possibilité de révolte.

Au cours du récit, Guillaume va souffrir comme les soldats souffrent : la faim, le froid et la chaleur extrêmes, les blessures, les demi-nuits.

Mais, là où les soldats, voyant leur sort et ne le tolérant que mal, aspirent au changement et à la paix, là où l’humain perçoit le non-sens de sa situation, le chien lui, ne se pose aucune question. Loin de remettre en question l’ordre établi, il va même, sans le vouloir bien sûr, mettre fin aux espoirs de ses compagnons combattants.

Ce qui rend l’analogie plus grande encore aux yeux de Morlac : la guerre n’est pas faite pour des hommes de raison et de coeur, mais pour des chiens. Des êtres loyaux, qui ne posent pas de regard critique sur leur situation. Et c’est comme des chiens que sont traités les soldats : malgré le fait qu’ils soient toujours en première ligne, au contact de l’ennemi, ils n’ont aucun pouvoir de décision. On leur demande d’agir, pas de réfléchir.

Retrouvez ici des commentaires de lecteurs.

 

Grâce au Collier Rouge, on apprend donc deux choses :

On en apprend plus sur la vie des combattants de la première guerre mondiale, la place qu’occupaient les chiens sur les champs de bataille et le retour à la vie civile. Pendant les guerres, les animaux ne disparaissent pas tous d’un coup, et il y en avaient encore un peu partout qui survivaient auprès des soldats. Mais je ne savais pas que quelquefois, des chiens combattaient auprès de leur maître…

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Pendant et après les guerres, les chiens remplaçaient les animaux de traits.

On voit aussi que le chien sert de métaphore. Sans être anthropomorphisé, il illustre une partie du caractère humain : la loyauté.

Evidemment, ce récit nous pose la question : faut-il être loyal, et à quoi ? On a tous en tête le dévouement sans faille des chiens, et on perçoit cela comme la plus grande des qualités de cet animal. Et c’est sans doute vrai, la loyauté est tout ce qu’on demande au chien, qu’il soit obéissant et intelligent (ce qui peut se traduire par : suffisamment intelligent pour comprendre et faire ce que je lui demande…).

Ce qui est une qualité chez le chien peut devenir la pire des bêtises chez l’humain. Je donnerais bien un exemple, mais j’atteindrais le point Godwin !

 

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Monument dédié aux animaux ayant servi pendant la guerre.

 

Longue histoire raccourcie, comme diraient les américains, ce livre est assez émouvant, et raconte un lien maître-chien assez inattendu. On (re)découvre une page d’Histoire, on s’émeut des conditions de vie sur les champs de bataille, habitués que nous sommes de la violence sur les humains, on s’inquiète du sort des bêtes qui partageaient leur quotidien.

Une lecture intéressante, qui dénonce les violences de la guerre.

 

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« Ils n’avaient pas le choix. »

 

L’histoire finit bien pour Guillaume, qui finit par trouver un maître aimant… 😉

Si vous avez la flemme, sachez que l’histoire a été adaptée au cinéma, vous n’avez donc pas d’excuses, foncez !

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« Par paix, on veut dire la capacité à transformer les conflits avec empathie, sans violence, et par créativité, un processus sans fin. » Johan Galtung

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