Jouer, ça n’a que des bénéfices : passer un bon moment, recharger ses batteries, entretenir une relation de confiance avec son chiot, en profiter pour faire un peu d’éducation… Si l’envie de jouer est instinctive chez le chiot, jouer correctement s’apprend.
Mais comment leur apprendre à jouer à nos jeux ? Quand on n’a pas la passion des mordillements/courses poursuites et qu’on veut aller plus loin… Comment faire pour jouer avec mon chien ?
Le jeu chez le chien
Inné et acquis
Les chiots commencent à jouer très tôt. Pour les petits nés chez moi (groenendael, chien de taille moyenne) c’est vers le onzième jour que ça se passe. Alors qu’ils en sont encore au stade où ils titubent maladroitement, ils tentent des approches : ils se touchent avec leurs pattes avant, mordillent ce qui passe à portée de gueule. Au bout de quelques jours, ils commencent à jouer plus fort : en se poursuivant et en mordillant avec insistance, jusqu’à faire couiner l’autre chiot très fort (c’est là que la maman intervient pour mettre fin au jeu si besoin). Le jeu est donc plus affaire de satisfaire une envie personnelle que de passer un bon moment dans le partage et le consentement : les jeux peuvent être violents, les cris n’empêchent souvent pas le jeu de continuer. Bien sûr, ça, ce sont les prémisses !
Sautons à quelques jours plus tard, et les chiots ont appris que, lorsque le compagnon de jeu crie, il faut faire plus doucement ou s’arrêter. De plus, les chiots ont maintenant un peu plus d’un mois : ils marchent mieux et commencent à galoper. Les objets les intéressent et servent de support de jeu : on les attrape, les goûte, on court avec, on essaie de les voler aux copains, on tire dessus, on veut les garder pour soi. A cet âge, on peut commencer à jouer avec eux en suivant leur façon de faire : proposer un objet à tirer (une corde), une balle à faire rouler, encourager à se faire poursuivre…
A quoi sert le jeu chez le chien ?
Ce qu’il y a justement d’intéressant à observer, c’est ce mélange d’inné et d’acquis dans le jeu. Le jeu permet au chiot de se développer et d’apprendre. Le jeu motive le chiot à bouger et à interagir avec ses compagnons de litière, mais aussi avec tout son environnement. Il permet aussi d’apprendre à communiquer avec les autres : quand on mordille, on peut faire mal; quand un chiot a quelque chose, il peut se le faire voler : il doit apprendre à respecter et se faire respecter. C’est là qu’apparaissent aussi les jeux de domination : on joue à savoir qui est le plus fort, qui a tendance à prendre des choses, qui choisit plutôt de laisser un autre voir ce que c’est que ce truc nouveau plutôt que de se ruer dessus tout de suite… Bref, le caractère apparaît et se forge : curieux, brute, délicat, timide, observateur, câlin… Et le jeu donne aussi les codes sociaux.
Les codes sociaux
C’est justement ces codes que vous allez pouvoir continuer de transmettre à votre chiot en lui apprenant à jouer avec vous. Ces codes, ce sont des moyens de communiquer et des règles. C’est une introduction à la sociabilisation, c’est pourquoi il est toujours préférable de choisir un chiot qui a pu jouer avec des frères et sœurs, et de continuer ces jeux. En les faisant évoluer, on ne joue pas pareil entre chiots qu’avec un humain !
Communication
Entre chiots, c’est l’espace qu’on occupe, les mordillements, les jappements, les aboiements, les cris. Avec la mère, c’est tout cela plus les rappels à l’ordre : elle attrape à la nuque pour déplacer les chiots ou les séparer, elle reste imperturbable et ne rentre pas dans certains jeux (c’est toute une attitude). Avec un être humain, c’est reconnaître le « non ! », accepter de se faire déplacer, venir quand on tape dans les mains…
Règles
Les règles sont assez simples : il y a ceux qui prennent, ceux qui se font prendre les objets, ceux qui jouent trop fort se font gronder par la mère ou l’éleveur (en les séparant, donc le jeu s’arrête), les mordillements doivent être dosés… (faire mal = se faire gronder) etc.
Bien jouer avec un humain, qu’est-ce que ça veut dire ?
Pour continuer dans l’état d’esprit jeu = apprentissage des relations, il est important de respecter certaines règles de bonne conduite.
Récréation
Pour nous autres humains, le jeu est souvent synonyme de récréation : on peut se défouler, faire fi des règles, faire un peu ce qu’on veut. Vraiment ? Il y a toujours eu des règles, même dans la cour de récréation de la maternelle. C’est un peu le même principe avec votre chiot. Il n’est pas utile d’opposer travail d’éducation et jeux. Le jeu est un outil d’éducation. La manière dont vous jouer avec votre chiot l’éduque, le façonne.
Différence entre jeu et travail éducatif
S’il fallait vraiment faire une distinction entre les deux, je dirai que lorsqu’on fait une séance d’éducation, il y a un objectif défini à atteindre. Qu’on en ai envie ou pas, on doit aller au bout de la séance, finir sur une réussite, respecter le cadre.
Points communs
Les points communs entre séance éducative et jeu sont :
-Le maître décide quand on commence et quand on arrête ;
-Les règles de bonne conduite doivent être respectées : quand un ordre est donné, on l’exécute ; même si on chahute, on ne doit pas faire mal ;
-Les objets appartiennent au maître et ne sont que prêtés au chien.
Quels jeux faire, pour commencer ?
On l’a vu plus haut, l’envie de jouer est naturelle chez le chien, mais il faut lui apprendre comment. Et en même temps, nous allons travailler sur le contrôle de la mâchoire.
Avant de jouer : pensez à faire faire les besoins à votre chiot. Il faut qu’il ait de l’eau à disposition. Une séance de jeu chez un jeune chiot ne doit pas dépasser les 30 minutes : c’est un grand maximum. Un chiot ne sent pas la fatigue et peut s’épuiser. De plus, on évite de faire sauter, même des petits obstacles. Pendant toute la période de croissance, il faut y aller doucement, au risque de provoquer des problèmes articulatoires. Donc, ne l’emmenez pas tout de suite courir avec vous ou vous suivre lors de balade à vélo.
La sensibilisation à la morsure
Le chiot doit apprendre à contrôler sa mâchoire. Quand il vous attrape par le pantalon, la veste, un sac… bref, tout ce qui n’est pas un jouet, décrochez le chiot si besoin et tirez le doucement mais fermement par la peau du cou. (Ça peut paraître contre intuitif au début, mais c’est moins douloureux et moins dangereux pour le chiot de se faire tirer par la peau qu’étrangler par le collier qui vient écraser la trachée.) Répétez calmement : « non. » ou un autre mot d’un ton grave (par exemple : « hin hin » « holàààà »).
S’il vous attrape directement la peau, que ce soit douloureux ou non, faites un grand « aïe ! » et regardez-le d’un air courroucé, mais toujours en restant calme. Pareil, éloignez-le de vous en le tirant par la peau du cou.
Il ne faut pas se dire que le chiot apprendra « tout seul » plus tard, que « pour le moment c’est un bébé, il ne fait pas mal ». Le chiot apprend parce qu’on lui indique la voie.
Le dummy
Prenez un dummy (sorte de boudin rembourré) ou une grosse corde tressée. Le but du jeu : que le chiot tire d’un côté, vous de l’autre. C’est le jeu le plus intuitif, je vous conseille de commencer par celui-là. Pour inciter le chiot à l’attraper et à tirer, encouragez-le en l’agitant près de sa gueule. Certains chiots ont plus besoin d’être encouragés que d’autres, car ils ont pris l’habitude de se faire bousculer et sont devenus trop soumis. D’autres au contraire montent en excitation plus rapidement. A vous d’ajuster la dose d’encouragements/excitations et de remise au calme. Rapidement, vous allez pouvoir inclure les mots « tire ! » et « donne. ».
Pour ce faire, c’est très simple. Profitez que le chiot soit en train d’effectuer l’action (de tirer sur le dummy), et répétez « tire ! » d’une voix enthousiaste.
Pour apprendre « donne. », changez d’attitude. Devenez très calme, comme si le jeu était fini, et récupérez le jouet. Vous pouvez mettre les mains dans la gueule du chiot pour qu’il lâche. Quand il l’a lâché, répétez « donne. » Suivi d’un joyeux « c’est bien ! ». Puis recommencez à jouer : vous devrez répéter l’opération plusieurs fois jusqu’à ce que le chiot comprenne. Petit à petit, vous aurez de moins en moins besoin d’utiliser la force pour qu’il donne et c’est ça l’effet recherché. Ce qui est important, ce n’est pas de montrer que vous êtes plus fort physiquement, mais qu’il doit coopérer quand on lui demande quelque chose.
Le dummy peut être une excellente récompense. C’est votre jouet, le chien ne l’a jamais complètement pour lui. La récompense, c’est de pouvoir tirer dessus avec son maître.
Terminez toujours la séance de jeu sur une réussite : soyez calme, reprenez le jouet, dîtes « c’est fini. » et rangez le jouet. Puis ignorez le chiot s’il vous sollicite et prenez la laisse : il voudra sûrement faire ses besoins après une bonne séance.
La balle
Apprendre à rapporter, c’est un autre niveau ! En fait, ça dépend beaucoup du chiot. Certains comprennent très vite, d’autres mettent plus de temps. J’aime bien les modèles avec une corde, car ils permettent d’utiliser la balle comme un dummy : ça facilite l’apprentissage. Vous pouvez commencer comme avec le dummy : en excitant le chiot, en l’incitant à attraper la balle, en tirant un peu sur la corde. Puis, lancez la balle en vous exclamant « cherche ! ». Quand la balle est attrapée, félicitez d’un « oui ! » enthousiaste ou d’un « c’est bien ! »
Quand on éduque un chien, on est très expressif. Tout doit être exagéré : le ton de la voix, les attitudes… N’ayez pas peur d’en faire des caisses. Le chiot comprend avant tout un ensemble de signes.
Puis, ça dépend du chiot. S’il vous la rapporte spontanément, encouragez-le d’un « rapporte ! » « c’est biiien ! ». Demandez-lui de donner la balle (« donne. ») et continuez le jeu.
S’il se carapate avec (c’est la majeure partie des chiots qui réagissent comme ça), vous pouvez vous accroupir et applaudir pour le faire revenir. Vous pouvez aussi, si le chiot est rodé à l’exercice avec le dummy, lui faire lâcher à distance en lui disant « donne. » Normalement, ce qui intéresse le chiot, c’est l’interaction. Donc il devrait se lasser de sa balle qui ne se lance pas toute seule et revenir vers vous. Félicitez, mais essayez de garder à l’esprit que, lorsqu’un ordre est donné, il doit être respecté. Il faudra aller petit à petit vers la réussite ou tricher pour ne pas donner au chiot l’impression qu’il peut vous mener en bateau.
Une autre astuce est de mettre le chiot en longe (très recommandé si vous travaillez en extérieur tant que le chiot n’a pas le rappel) et de le tirer doucement vers vous quand vous voulez qu’il revienne. Même s’il lâche la balle en cours de route, ramenez-le jusqu’à vous puis allez chercher la balle.
C’est vraiment un long travail que d’apprendre à rapporter. Ne soyez pas étonné si cela prend du temps. Vous pouvez aussi tricher en utilisant des bâtons ou autres pommes de pin. Vous les lancez mais vous n’attendez rien d’autre. Si le chien ne rapporte pas, ce n’est pas grave. Le moment où le chien rapporte, vous félicitez beaucoup et renvoyez tout de suite l’objet. Ce jeu enthousiasme vraiment les chiens, mais le déclic peut être long.
Il arrive que les réussites soient des accidents. Ce sont les meilleures réussites car c’est le chien qui a trouvé tout seul et cela l’encourage à tester des trucs pour nous plaire.
Les jeux de cache
On peut aussi s’amuser à stimuler l’odorat du chien en cachant des friandises ou un jouet qu’il aime, de préférence dans un petit périmètre au départ. Cela peut être un jouet conçu pour ça ou une création maison : un tas de vieux chiffons, un tapis de fouille, des rouleau de papier toilette vide rangés à l’horizontale dans une boîte à chaussures… L’important, c’est de conserver les principes de bases : surveillez le chiot pour limiter les bêtises (avaler du tissu peut provoquer des occlusions), y aller progressivement en découpant les étapes, ne pas laisser le chiot faire n’importe quoi non plus sous prétexte que c’est la récré.
Les jeux de précision
Il est possible aussi d’apprendre au chiot à reconnaître ses différents jouets. Commencez avec un seul jouet et répétez le nom de celui-ci avant de lui donner. Faites de même avec un second jouet. Au bout de quelques séances, posez un seul jouet par terre, en vue du chiot, puis prenez le chiot avec vous. Éloignez-vous un peu et dîtes le nom du jouet en question en lâchant le chiot : il va s’y précipiter. (Sinon, il faut jouer un peu avec lui avant pour le booster.). Répétez plusieurs fois.
Puis vous ferez de même avec un autre jouet.
Quand ces étapes sont maîtrisées, vous pouvez poser les deux jouets et donner au chien l’instruction de chercher untel. Si ça ne marche pas du tout, et que le chiot en rapporte un au hasard, répétez le nom du jouet que le chiot vous rapporte et félicitez. Continuez comme ça quelques séances.
Certains chiots sont plus sensibles au mouvement : vous pouvez par exemple poser le dummy, prendre le chiot avec vous. puis lancez la balle de façon à ce qu’elle roule près du dummy et lâchez le chiot : il y a de fortes chances pour qu’il s’intéresse plus à la balle qu’au dummy. Ce sont des façons de tricher pour pousser le chiot à choisir le bon jouet.
Ces jeux prennent beaucoup de temps : n’hésitez pas à y aller petit à petit, en découpant les étapes le plus possible. Quoi qu’il arrive, essayez de clore sur une réussite. Cela peut être en redemandant quelque chose d’acquis.
Jouez, jouez, jouez !
Le jeu, c’est aussi faire de l’éducation déguisée. On apprend des choses, on entretient une belle relation avec son chien, on se canalise, on se défoule… C’est une activité à prendre au sérieux ! Vous avez sûrement déjà vu des enfants jouer, ou peut-être tout simplement vous rappelez-vous vos propres jeux d’enfants.
Il n’y a rien de plus sérieux qu’un enfant qui joue. C’est ce même esprit qu’il nous faut cultiver, nous autres adultes, quand nous travaillons avec nos chiens : l’éducation est un jeu, le jeu est une éducation.
Vous souhaitez créer un cadre éducatif pour votre chiot ?
Vous avez des difficultés à gérer les premiers jours avec votre chiot ?
Vous ne savez pas quel matériel choisir ?
Il y a encore plusieurs articles qui pourraient vous intéresser !